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Compte-rendu des séances de l'atelier Enjeux du monde contemporain

 

             Dispositif EHPI - Atelier « Débats » - compte-rendu des échanges         

     
Faut-t-il une éducation sexuelle, de genre, des phénomènes sociaux liés au sexe/genre à l'école ?

Tout d'abord, il a été dit que ce genre de sujet pouvait être gênant à aborder avec sa famille selon la qualité des relations que l'on pouvait entretenir avec cette dernière. Aussi, tout le monde aurait pu "en avoir entendu parler", dans le cas où "le sujet" n'aurait pas été discuté à la maison.   

Est venue rapidement la nécessité de cadrer la définition "d'en parler".

Pour la suite des échanges, il s'agira premièrement des questions liées à la sexualité de manière général, mais aussi de l'identité sexuelle, et de genre.

Après cette première intervention, un doute s’est révélé sur un mécanisme vicieux que, peut-être, un enseignement/une sensibilisation aurait entraîné : Si l'école fait le travail de la famille, à savoir éduquer, cette dernière ne va-t-elle pas renoncer à son devoir et laisser à l'école tout le soin d'éduquer son enfant sur les questions sexuelles ? L'école ne doit pas avoir le monopole sur ces questions, c'est ce qu'on retiendra.

Par la suite est lancée une liste des responsabilités et rôles que devrait endosser l'école aujourd'hui à savoir :

–          Instruire sur la question de la sexualité, d'identité sexuelle et de genre

–          Identifier les comportements oppressants, et donner les outils pour les défaire

–          Faire un état des lieux sur les inégalités de genre, les violences sexistes et sexuelles

–          Rassurer et assurer les élèves d'un soutien total sur les questions sexuelles et de genre, de violences

Une objection a été faite sur le fait de parler de tous ces sujets "sensibles" à l'école : Il faut rester objectif à l'école, le personnel en est-il capable ? La discussion n'a pas pu aboutir à une définition satisfaisante "d'objectivité", il a juste été rajouté deux choses : Que le risque de manque "d'objectivité" pourrait plutôt venir de l'institution que des individus et aussi qu'actuellement, les campagnes de sensibilisations sont menées par des personnes soit du secteur médical (personnel de gynécologie-obstétrique, etc.), ou de structures associatives féministes (pour ce qui touche aux questions de VSS et d'oppression).

Nous sommes retourné.es sur l'essence même de l'école : éduquer ou simplement instruire ?

Là encore, il n'en est pas sorti un consensus clair, il a juste été dit que l'école pourrait servir de « contre-pouvoir » à l'éducation de parents violents ou ayant des positions haineuses.

En repartant de ce qui existait déjà, en France où en Belgique (point de départ de la discussion à cause de l'actualité, à savoir les écoles vandalisées en Belgique par des extrémistes religieux hostiles à des cours d’éducation sexuelle), plusieurs idées se sont alignées rapidement :

–          La nécessité absolue d'un « quelque chose » à l'école, pour lutter contre les fakes news et le fléau du porno mainstream (accessible à tout le monde et relayant des images violentes qui perpétuent les stéréotypes de genre et de sexe, le patriarcat, etc.)

–          L'insuffisance des dispositifs de sensibilisation en France (selon la loi, ce sont trois campagnes de sensibilisation qui doivent avoir lieu chaque année, et qui portent uniquement sur la procréation ou la prévention des MST)

–          Les modalités de ces dispositifs, que ça soit sur la question de l'âge et du contenu de ces campagnes. Le caractère ponctuel actuel de ces campagnes est jugé comme étant une faiblesse, une organisation tout au long de l'année serait peut-être préférable.

Pour en revenir sur le point de l'âge des élèves qui bénéficierait de ces « cours », il y a eu tout une discussion : certaines personnes trouvaient qu'on ne pouvait pas parler de sexe à tout âge, d'autres ont évoqué le souci du tabou sexuel ancré dans nos sociétés. Le fait d'adapter le contenu a un public donné a fait l'unanimité. Aussi, pour reprendre le cas belge, il a été fait mention d'un échange constant avec les élèves, ce qui permettait de parler de sujets abordés par les élèves selon leur vécu et leurs questionnements, et non de déballer un discours entier associé à une tranche d'âge, bien que certaines informations restent des passages obligatoires selon bon nombre de personnes dans la salle.

Comme nous parlions ici de jeunes élèves, la nécessité de rappeler la réalité des crimes incestueux a permis d'étoffer encore la réflexion sur le rôle de l'école comme lieu de prévention et d'accueil des victimes, pourvu qu'un personnel formé soit présent...


Faut-il continuer à utiliser l’appellation EHPI ?

Il faut trouver un nouveau nom. Ce n’est pas un diagnostic, c’est une évaluation. Le QI ne relève pas de l’ordre médical. Se focaliser là-dessus amène à une invisibilisation d’autres particularités de l’individu : TDAH, autisme… On croit toujours que « HPI = bonne notes », ce qui fait porter une forte pression sur les épaules, comme un sentiment d’obligation de rentrer dans cette case. Les HPI n’ont pas tous des résultats excellents, ça varie. Des chercheurs ont étudié les HPI et ont conclu qu’il n’y pas de réelles différences avec les autres personnes dites « normales ». On peut d’ailleurs s’interroger sur ce que signifie exactement « personnes normales ». Le terme « HPI » est inventé par l’homme, ce n’est pas une catégorie « naturelle », même s’il y a probablement des facteurs génétiques. Il y a une tendance dans la science à tout mesurer, dont l’intelligence. En Israël, les résultats des tests de QI déterminent l’orientation (ex : résultats élevés => études d’ingénieur). En en Allemagne, ils jouent un rôle à fin primaire pour déterminer si on part en séries générales ou en formation professionnelle. Est-ce le fait d’être évalué.e/diagnostiqué.e HPI qui nous fait nous sentir différent.e ? Ou à l’inverse, existe-t-il des différences objectives qui soient réellement communes à tous les HPI et qui aient conduit à la passation des tests ?  L’intelligence n’est pas le seul critère : hypersensibilité, tendance à comprendre trop vite, tendance à se rapprocher des adultes, avoir des conversations avec des adultes, réflexion sur la mort, l’univers, forte sensibilité à l’injustice, difficulté à s’intégrer avec les autres jeune du même âge, du mal à s’exprimer (traits que l’on retrouve sur le spectre de l’autisme). Un recueil recense annuellement aux États-Unis les maladies mentales (DSM III). Or, on observe une tendance inquiétante à l’inflation des pathologies. Faut-il forcément toujours tout médicaliser ? Il y a une constante volonté de catégoriser les personnes neuro-atypiques. Sait-on que le fameux Asperger a participé au tri des enfants par les Nazis selon leur supposée capacité à s’améliorer et à devenir des citoyens « productifs » ? Qu’est-ce que serait la normalité, finalement ? On trouvera toujours quelque chose de différent chez nous par rapport aux autres. On en vient même à questionner l’utilité d’un dispositif HPI ! On pourrait réorienter ou compléter le dispositif pour les personnes avec d’autres neuro-atypies : aides psychologiques… Les facteurs pour effectuer un test sont : avoir des bonnes notes, s’ennuyer en cours, facilité de compréhension… Mais combien ne passent pas de tests ? On peut interroger ce biais. Un QI élevé est peut-être plus induit par l’éducation que par la génétique. Il peut même porter préjudice aux personnes avec cette étiquette, confrontées à des attentes plus élevés… Il demeure beaucoup d’incompréhensions à cause des préjugés, mais l’appellation « HPI » reste meilleure que « surdoué.e » ou toutes les autres anciennes appellations.


FAUT-IL UN UNIFORME A L’ECOLE ?


POUR

Ça permettrait de faire des économies, il n’y aurait pas besoin de racheter des vêtements constamment.L’uniforme n’empêche pas de se distinguer physiquement, avec des chouchous, accessoires divers, bijoux, etc. (argument qui peut aussi être « contre »)Les gens sont déjà en uniforme, ils sont tous habillés avec des jeans et des vêtements américains. Ce ne sont juste pas des vêtements choisis par l’établissement mais par une culture capitaliste américaine. L’uniformité choisie par l’établissement est préférable à l’uniformité économique américaine.Il y a déjà des formes d’uniformes parfois. Devoir bien s’habiller, tenues dans la restauration, certains BTS…L’uniforme ne désignerait pas une appartenance à une religion, culture, genre, passion… mais seulement à un établissement. Les liens que peuvent créer l’absence d’uniforme (par affinités vestimentaires, style, etc.) peuvent aussi créer des divisions qui n’auraient pas eu lieu avec un uniforme.Avec l’uniforme, on s’intéresse plus à l’intériorité de la personne plutôt qu’à ce qu’elle renvoie.L’uniforme, on peut trouver ça beau. Il est symbolique : ça crée une rupture, où l’on voit que l’école est l’établissement dédié au savoir.Le fait que l’uniforme soit « lassant » n’est pas un argument. L’école n’est pas le lieu pour s’amuser.

CONTREIl n’y a pas de réel intérêt à l’uniforme.Ça ne résout pas les problèmes comme la lutte des classes ou le harcèlement, ce sera juste sous une autre forme. Par exemple, le Japon a des uniformes et c’est l’un des pays avec le plus d’harcèlement. Même avec un uniforme, ça ne cachera pas les inégalités. Au mieux, ça retardera de quelques semaines le jugement. Avec un uniforme dès le collège, il peut y avoir du conflit entre établissements.Le harcèlement n’a pas forcément de raison précise. Si on cherche, on en trouvera forcément une pour harceler. Donc le harcèlement n’est pas causé par les vêtements.Les personnes qui demandent un retour à l’uniforme est une idée de la droite conservatrice. C’est une idée qui se rapproche du fascisme.Les gens qui sont pour se disent souvent que c’est « stylé » parce qu’ils voient ça dans les séries, mais au bout de peu de temps ils se lasseraient, ça instaurerait une routine. Les élèves anglais, japonais… voudraient sûrement mettre les vêtements qu’ils souhaitent.Le prix de l’uniforme varie, ce n’est pas forcément moins cher. Ça dépend de qui fabrique l’uniforme. Les vêtements américains ne montrent pas une appartenance à un établissement. Et les uniformes peuvent aussi être exportés.L’uniforme est une manière de contrôler les corps. La manière de s’habiller ne devrait concerner que la personne qui s’habille et pas ceux qui la voient.Ça force la population à appartenir à une chose à laquelle il ne veut pas forcément appartenir. Ce serait dommage de supprimer la personnalité des gens, ou au moins sa visibilité. Ce qu’il faut, ce n’est pas empêcher une appartenance mais leur apprendre à se respecter les uns les autres. L’uniforme ne leur apprendrait pas cette valeur. Ne pas avoir d’uniforme pourrait créer des amitiés (mêmes passions…). A l’inverse, l’uniforme n’empêche pas le harcèlement.Le retour à l’uniforme correspond à une idéologie de grandeur du passé. Il est voulu par ceux qui s’imaginent qu’il n’y a pas d’autre moyen d’installer un ordre qu’une forme de militarisation.



                                        La violence peut-elle être légitime ?

                                                     Le numérique

Il faut commencer par distinguer l’appareil, par exemple un téléphone, de ses fonctionnalités. Si c’est utilitaire, pour appeler les parents, pas de problème. C’est la première fonction du téléphone pour les enfants. Mais certains l’ont très tôt, y compris avec réseaux sociaux, accès internet, etc. C’est trop tôt, et les jeunes ne sont pas matures. D’où des phénomènes comme le harcèlement, ou cyber-harcèlement. C’est souvent trop violent pour de jeunes esprits. A partir du collège, cela devient utile par exemple pour les groupes de classe, même si on y parle de tout sauf de cours ! Il y a une forme d’exclusion de fait si on n’a pas de portable au collège, notamment si on vit à la campagne. Dès la sixième, on peut déjà apprendre progressivement à utiliser certaines fonctionnalités, par exemple sur l’ordinateur des parents. Les youtubeurs sont devenus un phénomènes incontournable. Il est devenu difficile de passer à côté de Squeezy. Sa force réside dans le fait qu’il parle d’un peu de tout. Le format court des documentaires est adapté. Mais certains se contentent de se filmer en train de faire des crises en jouant aux jeux vidéo… Pour autant, ça fait des « vues » … Certains proposent de donner accès à tout, sauf à certains réseaux. Peut-on hiérarchiser Tik-Tok, X, Snapchat ? Chacun a ses avantages et ses inconvénients. Snap permet de donner un contact sans donner son numéro. Mais globalement, l’orthographe y est désastreuse… Youtube est à peu près correcte à ce niveau. « Geek » était presque une insulte il y a quelques années, c’est aujourd’hui revendiqué. Il faut rompre avec l’image négative des jeux vidéo : on ne devient pas meurtrier parce qu’on a joué à Call of duty ! Il y a juste que les limites d’âges ne sont pas adaptées, ou pas pour tous les jeux. Certains interdits ne sont pas justifiés. Entre 15 ou 16 ans, il n’y a pas une différence majeure. Il y a rapidement un effet de seuil. Certains peuvent avoir un caractère éducatif, beaucoup sont très esthétiques. Il y a des jeux pour tout le monde, tous les goût. On peut se relaxer avec ABZU (jeu de plongée), par exemple !  Mais il y a parfois un aspect de fuite de la réalité, d’enfermement dans sa bulle. Les jeux en lignes peuvent resocialiser. Les joueurs pro sont connus pour être sociables. Mais il ne faut pas oublier que l’aspect financier est central. Par exemple, World of Warkraft, c’est 12 euros/mois, sans parler du « pay to win » ou des cosmétiques à acheter. On a rendu les gens dépendants comme à une drogue, et on les fait payer ! 


                                     A quoi sert la culture aujourd’hui ?

On peut discuter de la notion d’utilité à ce sujet. Que faut-il entendre par « utilité » ? C’est le fait que ça apporte quelque chose de positif à quelqu’un à un moment donné. Mais cette définition est trop large car on peut pratiquement tout y faire tenir, y compris par exemple la guerre. « C’est quelque chose qui peut servir à quelqu’un ». Est utile ce qui satisfait un besoin. Mais ne faudrait-il pas distinguer différentes catégories de besoins ? Avec le hand spinner, on n’est pas très loin de l’inutilité absolue. L’utilité est proportionnelle au besoin à satisfaire. Il faut d’abord que la chose ait été voulue pour qu’elle soit utile ou au moins qu’elle favorise de fait la survie de telle ou telle forme de vie. Ainsi, au sens large, on peut qualifier d’utile l’oxygène de l’air même s’il n’a pas été placé là intentionnellement. Du coup, peut-on considérer la culture comme utile ? Si on fait entrer dans l’utilité tout ce qui a une fonction, la réponse sera nécessairement positive… Mais est-elle utile comme une table une chaise ou une fourchette ? Non, son utilité est bien moins définie. Mais il faut d’abord définir la culture… « C’est la globalité des connaissances qu’on peut acquérir dans le monde actuellement » proposent certains, mais cette définition semble trop restrictive. On peut y adjoindre des façons de vivre, qui par exemple peuvent définir des communautés. Il faut distinguer trois niveaux : la culture individuelle (une personne cultivée),  collective à l’échelon d’un groupe spécifique (la culture d’un peuple) et collective à l’échelle de l’humanité tout entière (et qui se distingue de la nature, en tout cas de la matière inerte, de la matière vivante non-pensante donc végétale). Il y a alors débat sur la notion de culture chez la animaux. Peut-on leur attribuer une culture à tous, ou seulement à une partie et laquelle ? Il y a le critère de transmissibilité non-héréditaire. 


                                           La neutralité est-elle possible ?

Dans une guerre ou un conflit, cela consisterait à ne pas prendre parti. Mais est-ce possible jusqu’au bout ? Si on ne prend pas parti, on ne peut agir. Y a-t-il toujours un « bon » et un « mauvais » camp ? Si l’un commet un génocide, il est inenvisageable de le soutenir, idem si deux pays s’entendent pour en envahir un troisième. Peut-on considérer que l’envahisseur a toujours tort ? Qu’en est-il d’un pays qui ainsi récupèrerait ses anciens territoires ? L’idéal serait de régler le conflit avant qu’il ait lieu, ou plutôt de le prévenir par la diplomatie. L’Allemagne était-elle fondée à récupérer les territoires qu’on lui avait retirés après la 1ère guerre mondiale ? Non, car l’Alsace-Lorraine était française avant la guerre de 70. L’absence de neutralité peut résider non pas dans le traitement mais dans le choix des sujets. 


Nous arrivons sur un île déserte : quelle organisation mettre en place ?
Nous convenons d’abord qu’une organisation, voire un règlement est nécessaire. L’objectif essentiel est notre survie, et sans un minimum de structuration, il ne peut être atteint. En revanche, nous refusons de nous donner un chef, même démocratiquement élu. Personne n’étant a priori légitime pour devenir le chef et notre petit nombre (7) nous autorisant une démocratie directe permanente, c’est cette option que nous choisissons. Pour autant, des consultations permanentes seraient totalement sclérosantes et il nous faut donc instaurer un mode de fonctionnement un tant soit peu stable et efficace. C’est pourquoi nous décidons d’abord de distribuer des fonctions jugées vitales, dans un premier temps sans contrôle a priori des compétences des uns et des autres. Seule l’expérience pourra permettre de stabiliser les fonctions, sans qu’il s’agisse pour autant d’une exigence incontournable. L’hypothèse d’un roulement systématique des fonctions reste posée. L’urgence étant la nourriture, nous créons deux postes de chasseurs-cueilleurs-pêcheurs, qui fonctionneront en binôme par souci de sécurité. Nous créons également un binôme d’explorateurs chargé de découvrir l’île, sa taille (supposée grande), ses limites, ses ressources, ses dangers. Nous nous donnons un artisan chargé de fabriquer les armes, les outils, le petit matériel, et un bâtisseur chargé de créer un camp un peu confortable. Ils seront à demeure au camp. Enfin, nous créons un poste de collecteur de matériaux (bois, pierres, eau, etc.) chargé de fournir les artisans en matières premières. L’hypothèse d’instaurer une hiérarchie entre ces fonctions est envisagée mais finalement abandonnée dans la mesure où chacun est indispensable à tous.Mais se pose le problème d’une sorte de « révolution néolithique » : faut-il passer au stade de l’agriculture et de l’élevage, à supposer qu’il existe sur l’île des animaux à élever ? Cette hypothèse est envisagée si les ressources naturelles ne peuvent à elles seules satisfaire les besoins. Mais dans le cas contraire, en l’absence de toutes « poussée démographique », la question se pose de savoir s’il est bien nécessaire de s’infliger du travail supplémentaire. Il est convenu qu’un système d’évacuation des déchets doit être instauré, pour des raisons de salubrité et pour ne pas attirer d’éventuels animaux dangereux. Se pose également le problème de la reproduction sans trop de consanguinité…Nous choisissons de nous donner un effectif minimum afin d’assurer la viabilité du groupe : 50 personnes, moitié de femmes, moitié d’hommes. Mais quel système politique pourrait empêcher un suicide collectif issu de décisions irrationnelles ? Faut-il une assemblée élue ? Peut-on avoir des systèmes différents parallèles ? Le seuil de 50 contraint à un système délégataire. Il faut en tout cas un régulateur des débats, type président.e de l’assemblée nationale. Peut-être faut-il une force publique pour protéger les éventuels élus ? En principe, chacun doit s’occuper de la survie de tous. On part du principe que nous avons accès à l’épave du bateau par lequel nous sommes arrivés, sauf une radio. On est obligé de partir d’une forme de pessimisme anthropologique si on considère que tout le monde arrive avec ses travers sociaux d’origine. On peut imaginer une perte généralisée de mémoire en tout cas politique, qui permet de repartir à zéro. Dans ce cas, le critère va être la capacité physique et technique à satisfaire les besoins collectifs. Il faudrait donc un délégué par métier ou type de compétence. On maintient le principe de l’interdépendance de tous à l’égard de tous. On peut imaginer un système de corporation ou une système du type Nouvelle Atlantide chez Bacon. Les compétences des plus performants sont supposées « innées ». Mais il faut des critères d’évaluation de la « qualité professionnelle » : quantité ou qualité de ce qui est fourni ou produit ? Il faut une chasse, une pêche et une cueillette écoresponsables, une compétence technique mais aussi du « charisme », une compétence sociale. Les compétences vont émerger « naturellement », et chacun en prendra conscience de façon « spontanée ». Il y a un risque de désigner non pas le meilleur mais le « copain »… Certains estiment qu’il faudrait un système de réserves d’aliments et de matériaux pour éviter que les îliens ne passent tout leur temps à rechercher de la nourriture. Il faut néanmoins que les produits en question soient non-périssables. On peut par exemple faire des réserves de poisson ou de viande fumée, séchée ou salée pour sortir de la simple survie. On peut construire pour stocker des outils, du matériel, etc. Mais historiquement, on sait que la guerre est apparue avec la constitution de stocks de nourriture : dès que certains possèdent et que d’autres n’ont rien, dès qu’il y a quelque choses à voler, les germes de la guerre sont semés. La question de la propriété, de la gestion et de la distribution des stocks en question devra être traitée. On envisage une petite agriculture vivrière, mais pas plus, le but n’étant pas de tomber dans une démarche « productiviste ». Celle-ci peut inclure des céréales, en ajustant les rendements aux capacités techniques et aux besoins. Il ne faut pas se rendre dépendants du travail. On va avoir besoin de maisons, et donc on en construit, mais sans luxe particulier, juste pour se protéger des intempéries. On peut organiser les activités, en commençant le matin par les activités vivrières, et mettre en place une rotation en fonction des besoins (ex : faire en sorte que les ouvriers et chasseurs aient de quoi manger le matin). On peut se donner un moulin et un four. On prend l’hypothèse que nous disposons d’une source chaude sur l’île (type « jacuzzi naturel »). Nous prenons certains décisions en matière « d’aménagement du territoire » (répartition des espaces de vie, de travail, de stockage, de culture…). Nous n’avons donc pas besoin de partir en exploration pour trouver d’autres îles, la nôtre nous suffit. Il faut des loisirs, sinon, les habitants vont déprimer.

Avis N°1 Légalisation GPA 2020

Comité Consultatif Lycéen d’Ethique

                                       Lycée Boucher de Perthes d’Abbeville

                                                              2020-2021

Avis N°1 : La Gestation Pour Autrui

Le Comité Consultatif Lycéen d’Ethique (CCLE) constate l’existence de facto à échelle internationale d’une pratique d’assistance médicale à la procréation appelée Gestation Pour Autrui (GPA). Il s’interroge sur l’opportunité de sa légalisation en France et sur les modalités précises d’une telle légalisation. Il reconnait majoritairement la légitimité du désir d’enfantement avec filiation biologique, y compris lorsque celui-ci ne peut se traduire par une grossesse, et la GPA comme l’une des formes possibles de l’Assistance Médicale à la Procréation (AMP) destinées à satisfaire ce désir. Il valide la nécessaire traduction dans l’état civil français des naissances par GPA réalisées à l’étranger afin que les enfants ne soient pénalisés ni par les décisions de leurs parents, ni par les distorsions entre les législations spécifiques à chaque pays. Cette traduction dans l’état civil équivalant à une légalisation qui ne dit pas son nom, la question d’une légalisation encadrée en France s’en trouve posée avec davantage d’acuité encore. Il s’agit également d’offrir un cadre à la fois légal et sanitaire à la pratique « sauvage » de la GPA, évitant notamment le recours à des femmes économiquement fragilisées dans les pays en voie de développement. Une telle évolution supposerait de faire évoluer la loi actuelle selon laquelle « la mère est celle qui accouche » au profit de l’idée selon laquelle la mère (comme le père) est celle qui engage le processus de GPA et accueille l’enfant (parentalité dite «de destination »). Une telle démarche ne pourrait être entreprise que dans le cadre d’un contrat très strict, juridiquement reconnu, entre la mère « porteuse » et le couple de destination. Le CCLE préconise le refus de tout lien financier entre les parties afin d’éviter toute forme de marchandisation du corps humain et des fonctions biologiques. Le cadre doit donc impérativement être celui d’une GPA « altruiste » entre personnes ayant un lien amical ou familial, même si la possibilité d’une GPA entre personnes initialement étrangères les unes aux autres doit rester ouverte. Si le cadre d’une GPA « commerciale » est à proscrire, la démarche ne saurait pour autant être à la charge financière de la mère « porteuse », qui doit avoir droit à un défraiement intégral et à un suivi médical gratuit de haut niveau. Elle doit avoir accès au régime du congé maternité comme pour une grossesse traditionnelle. Le contrat doit impérativement faire état des risques, même très faibles, encourus par la mère « porteuse » lors de la grossesse (hypertension, etc.) et de l’accouchement (hémorragie, hystérectomie, voire décès), qui doivent être compris et assumés en toute connaissance de cause. La mère « porteuse » doit également avoir déjà eu un premier enfant biologique afin de s’appuyer sur cette première expérience pour conduire au mieux la grossesse. L’âge minimum de la mère « porteuse » doit être celui de la majorité légale le plus élevée dans la majorité des pays (21 ans), l’âge maximum doit être antérieur à celui où apparaissent statistiquement des complications durant la grossesse ou l’accouchement (35 ans). Le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) doit être maintenu, sans recours possible de la part du couple de destination. Pour autant, la mère « porteuse » doit s’interdire tout comportement qui pourrait nuire au bon déroulement de la grossesse ou à la santé de l’enfant (consommation de tabac, d’alcool, de drogues, de fruits de mer crus, sports à risque, etc.). La mère « porteuse » doit pouvoir conserver un lien avec l’enfant (par exemple assister à ses anniversaires) si elle le désire, si les parents de destination et l’enfant en sont d’accord lorsqu’il sera en âge de décider. L’avis de l’enfant devient prépondérant à partir de l’âge de 10 ans. La GPA relève d’un lien contractuel entre sujets libres, adultes et responsables dans lequel ni la société ni l’Etat n’ont à interférer.

Dans le même temps, une part minoritaire mais non-négligeable du CCLE s’oppose très clairement à toute légalisation d’une telle pratique, même sous des formes aménagées. Elle appelle à interroger cette obsession d’une filiation biologique alors même que d’autres solutions existent, telles que l’adoption. Elle souligne qu’il existe suffisamment d’enfant privés de parents pour ne pas s’engager dans un processus nataliste long, coûteux ; psychologiquement, socialement et médicalement risqué. Elle y voit en effet une forme déguisée ou symbolique de la marchandisation du corps humain et de ses fonctions biologiques, tant il ne saurait y avoir en la matière de gratuité complète et garantie. Si la démarche devait avoir lieu au sein d’une même famille, ou même dans le cadre d’un lien amical, le risque de pressions ou de formes diverses de subornation reste majeur. L’état actuel de la pratique confirme bien qu’il s’agit toujours d’un lien contractuel pseudo-égalitaire entre un couple destination aisé et une mère « porteuse » dans le besoin. Il ne s’agit en fait que d’un rapport de sujétion déguisé en rapport contractuel. Les très nombreuses limitations de libertés pour les mères « porteuses » actuelles (interdiction d’avoir des rapports sexuels avec son propre mari en début de grossesse, interdiction de sortir du pays en fin de grossesse, etc.) en constituent, si besoin était, une preuve supplémentaire. L’argument de la nécessaire traduction dans l’état civil français présente une vraie difficulté démocratique et tous les aspects d’une boîte de Pandore en ce sens qu’il ne sera bientôt plus possible de refuser quoi que ce soit : faudra-t-il aussi légaliser le clonage reproductif humain le jour où il aura été pratiqué à l’étranger ? Modifier la définition juridique actuelle de la maternité (« la mère est celle qui accouche ») présente également un fort risque de dilution du lien juridique, social et psychologique entre parents et enfants, au point qu’un enfant issu de GPA pourrait potentiellement se retrouver avec cinq « co-parents » (les donneurs de gamètes, les parents de destination, la mère « porteuse »). Qui est aujourd’hui en capacité de mesurer les dégâts notamment psychologiques d’une telle rupture anthropologique ? Il faut également souligner que l’attachement de la mère « porteuse » à l’enfant constitue ce que l’on ose à peine appeler un « risque » quasi-inévitable, y compris lorsqu’elle a déjà eu un enfant. Faudra-t-il donc que la police vienne arracher de force l’enfant à la femme qui l’a porté au nom d’une « violation de son contrat » ? La GPA considère la femme comme « un utérus sur pattes » et postule que l’on pourrait louer ou se faire prêter son utérus comme un appartement, alors même que tout indique que les relations entre la mère et l’enfant in utero sont fortes et, à ce jour, largement mystérieuses. Certains psychologues soulignent déjà que l’enfant vit sa préhistoire psychique durant la grossesse en percevant a minima la voix de sa mère et va devoir brutalement dès la naissance réorganiser tous ses repères lorsqu’il sera retiré à celle qui l’a porté pour être donné à une autre. Il a par ailleurs été déjà constaté que les enfants existants de la mère « porteuse » développent parfois des syndromes d’abandon (« si maman donne l’enfant qu’elle porte, elle pourrait nous donner aussi »). Parallèlement, les risques pour la mère « porteuse » sont loin d’être négligeables, en tout cas incommensurables au regard de l’enjeu, jusqu’à mettre en danger sa propre vie, et ne sauraient être mis sur le même plan que ceux qui sont pris par un militaire qui défend les intérêts (réels ou supposés) de son pays ou par un pompier qui sauve des personnes d’un incendie : il ne s’agit jamais en effet que de satisfaire un désir, empreint de biologisme, d’avoir une enfant du même « sang ». La société et l’Etat ont toute légitimité à contrôler, voire en l’occurrence à interdire la GPA dans la mesure où elle viole certains principes fondateurs tels que l’indisponibilité du corps humain et de ses fonctions, et fait appel à un financement public du congé maternité et du suivi médical.